mercredi 10 septembre 2014

L’unité nationale et l’intangibilité des frontières : Nouveaux pièges des Etats indépendants africains


Par Tchibouela Makosso




Les années soixante virent la majorité des peuples africains accéder à l’indépendance après une longue période qui conjugua esclavage et colonisation. Une expérience aussi traumatisante aurait dû pousser les Africains d’en faire un bilan afin d’une part, de comprendre ses tenants et aboutissants. Et, d’autre part, de dégager les perspectives du nouveau « Vivre Ensemble » auquel ils allaient dorénavant s’atteler à construire dans cette Afrique nouvelle. 


 En lieu et place d’un inventaire, les Africains s’empressèrent de conforter l’émiettement de l’Afrique tel que le réalisèrent les colonisateurs européens lors de la conférence de Berlin (novembre 1884 à février 1885) : L’intangibilité des frontières héritées de la colonisation fut reconnue et retranscrite dans les constitutions des nouveaux Etats. De plus, toutes les aliénations qui affectèrent les peuples Africains ne furent point remises en cause. Ainsi, la Franc-maçonnerie, le Christianisme, l’Islam,…ne firent point du voyage de retour de ceux qui nous les apportèrent.


Ces aliénations et le cadre d’administration coloniale ayant subsistés à l’indépendance, la voie aux dérives dans la gestion sociétale de l’Afrique nouvelle fut alors grandement ouverte.


Très vite, la course au pouvoir, à la place du Colon devenue vacante s’affirma comme la préoccupation fondamentale des peuples Africains.


Dans cette quête effrénée, le modèle du Colon en fut la norme.


Le Colonisateur fut chez nous minoritaire. Et, pour asseoir son pouvoir, il en fut le détenteur des leviers de la société qu’il contrôlait. Ainsi, il se retrouva à la tête de l’administration, de l’appareil économique et des structures socio-culturelles. Et, délégua aux locaux, des postes secondaires.


Autrement dit, pour dominer un peuple, nul n’est besoin d’occuper toutes les strates, seules les strates de responsabilité et la possession des compétences suffisent. En procédant ainsi, les Colonisateurs marginalisèrent les locaux dans l’acquisition des compétences supérieures permettant d’avoir part à l’exercice du pouvoir. Et, donc, ils les rendirent inaptes à gouverner la société qu’eux les colonisateurs vinrent bâtir.


Cette recette fut mimée par les locaux. Et, elle est encore utilisée par les ex-colonisateurs dans leur volonté de déstabilisation et de reprise en mains des Etats africains. 


Que voit-on donc sous nos jours d’indépendance ?


L’indépendance des peuples Africains devrait marquer dorénavant l’affirmation souveraine de leurs propres choix et aspirations. Or, l’Occident, sans cesse en quête de matières premières et de marchés a joué de la naïveté de certains Africains pour continuer à bénéficier des largesses africaines sans la contrepartie équivalente.


A cette fin, l’Occident s’est toujours via sa politique du diviser pour régner, porter vers les minorités. Aussi, retrouve-t-on à la tête de nombreux Etats africains des ressortissants de minorités ethniques.


Pourquoi le choix des minorités ?


Pendant son règne de colonisateur, l’Occident usa de sa règle de discorde pour diviser et asseoir entre les peuples dans les colonies, des différences qui n’en furent pas au fond : Sud contre Nord, Est contre Ouest, valorisation sociale de tel peuple aux dépens d’un autre, supériorité intellectuelle de tel peuple,…


 A la sortie de la colonisation, les nouveaux Etats apparurent telles des mosaïques ou des bric-à-brocs de peuples. Un tel contexte fut propice à l’exacerbation de la concurrence pour l’accès au pouvoir. Et, donc, offrait favorablement à l’Occident, un terrain de jeu où il pouvait venir faire son marché de valets à ses intérêts contre ses services. Promouvant d’un côté la démocratie, l’Occident prépare toujours par ailleurs d’autres cartes (sujets africains acquis à sa cause) prêtes à être battues en temps utile !


C’est alors qu’entrent en scène, les minorités. Le peuple minoritaire ne faisant pas le poids devant un peuple majoritaire, aurait tendance pour obtenir le pouvoir et le conserver, à faire les concessions les plus importantes à l’Occident.


Cette minorité pour conserver son pouvoir se met ensuite à marginaliser les autres composantes sociétales : discrimination dans l’administration, l’économie, l’armée et l’accès à la formation. Ainsi, comme il fut déjà dit bien avant, en restreignant l’accès des autres à la gestion de l’Etat, élimine la concurrence et rend de ce fait, les autres, inaptes au pouvoir.


En agitant par ailleurs, le discours sur l’unité du pays et l’intangibilité des frontières permet de verrouiller le dit pouvoir qui peut devenir très rapidement assimilable à une dynastie, si les peuples victimes de discriminations ne réagissent pas !

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